Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
21 août 2022 7 21 /08 /août /2022 12:32

Dans un ouvrage tout récemment publié aux Dschang University Press et intitulé : L’École Nouvelle, le Syndicat National Autonome de l’Éducation, en Abrégé SNAEF, promeut un paradigme pédagogique adossé à une architectonique constituée de trois piliers. Ce paradigme dont il établit la pertinence suivant l’argumentaire qu’il présente dans cet ouvrage, oppose à la conception coloniale, néocoloniale, économiste et techniciste de l’école une nouvelle approche qu’il juge appropriée au développement intégral de l’homme et au progrès de l’humanité.

I-Le paradigme du SNAEF

Le paradigme proposé dans ce livre par le SNAEF s’inscrit dans la logique de la rupture. Ceux qui ont contribué à la conception et à l’élaboration de ce paradigme nous proposent de rompre avec celui qui structure l’école coloniale, et dont l’école néocoloniale a, pendant longtemps, sous-traité les fondements, les modalités et la finalité, à travers une pédagogie assurée par des pédagogues-fonctionnaires généralement réduits à la condition de simples mercenaires.

C’est à ces deux modèles d’école, qui se réduisent en réalité à un seul, le second étant la version reproduite du premier, que le SNAEF oppose le sien. Suivant l’optimisme pédagogique dont il fait preuve, et dans le cadre duquel il conçoit l’école comme le laboratoire par excellence de production et de diffusion des savoirs théoriques et pratiques dont l’homme a besoin pour actualiser son humanité, le SNAEF promeut une nouvelle conception de l’école adossée à des piliers comme l’humanisme, la décentralisation et la participation. Ce que le SNAEF défend à travers le paradigme qu’il promeut dans cet ouvrage, c’est la conception selon laquelle l’école est le haut lieu de production et de diffusion des savoirs théorétiques, des savoir-vivre, des savoir-être et des savoir-faire indispensables à l’édification intégrale de l’homme, au développement d’une nation et au progrès de l’humanité.
La nouveauté du paradigme que promeut le SNAEF réside dans le fait qu’il rompt avec la conception économiquement déterminée de l’école et de l’éducation. C’est principalement à la conception économiste de l’école et de l’éducation que le SNAEF oppose son paradigme.

II-De la conception économiste et techniciste de l’école à la nouvelle philosophie de l’éducation du SNAEF

Pour bien saisir le sens de la nouvelle philosophie de l’éducation que propose le SNAEF dans cet ouvrage, il faut la rapporter à la crise de l’éducation dont on a par exemple l’expérience au Cameroun, et qui est consécutive à l’émasculation économique et politique de l’État des suites des politiques d’Ajustement structurel. Plus précisément, elle s’explique par le fait qu’un État comme le Cameroun a dû, pour cause d’Ajustement structurel qui s’est accompagné du phénomène de restriction budgétaire, laisser l’école à la discrétion des businessmen préoccupés de profitabilité ou de rentabilité dans un secteur où il n’est du tout approprié de poser les problèmes liés à la production des savoirs et à la formation humaine suivant les appétits économiques. Pour le SNAEF, la crise de l’éducation est localement ou globalement constatée lorsque l’école est sous l’étau d’un économisme pédagogiquement délétère et humainement exsangue.
À la conception néolibérale de l’éducation que défendent les institutions de Bretton Woods, et dans le cadre de laquelle l’école est surtout considérée comme une rente, le SNAEF oppose celle qui considère plutôt l’école comme une structure de production des savoirs et d’éducation aux valeurs partageables. Suivant la vision économiste que rejette le SNAEF, l’éducation est un bon business, le savoir un produit marchandisable et l’école une entreprise rentable. La critique que le SNAEF mobilise contre la conception néolibérale de l’école l’amène à douter de la pertinence de l’Approche pédagogique par les Compétences. Idéologiquement adossée à la vision économique et techniciste de l’école, l’Approche pédagogique par les Compétences (APC) fait l’impasse sur ce qui est de nature à édifier humainement l’individu, au seul profit des savoir-faire que l’économie néolibérale promeut pour des besoins d’employabilité. En survalorisant les compétences ou les savoir-faire par rapport aux savoirs théorétiques, aux savoir-être et aux savoir-vivre, l’APC s’inscrit dans l’approche néolibérale que critique le SNAEF, compte tenu du fait qu’elle est économiquement trop déterminée pour permettre à l’école d’atteindre la finalité à laquelle elle se subordonne et qui constitue, en même temps, son essence et sa véritable raison d’être.

III-Le nouveau paradigme pédagogique du SNAEF et la fin à laquelle il se destine

Le nouveau paradigme pédagogique à la promotion et à la réalisation duquel collabore le SNAEF, a une architectonique constituée, comme cela a déjà été dit, de trois piliers à savoir, l’humanisme, la décentralisation et la participation. Si, pour son efficience, cette architectonique a besoin aussi bien du concours des enseignants bien formés et passionnés pour les missions qu’ils sont chargés d’accomplir que des parents et de l’État qui, sous aucun prétexte, ne doit jamais laisser l’école et l’éducation à la discrétion des hommes d’affaires, le nouveau paradigme dont elle est le fondement a pour fin la formation d’un homme suffisamment armé de connaissances pouvant lui permettre non seulement de comprendre le monde et donner un sens humain à son existence, mais aussi d’apporter une heureuse contribution à la dynamique d’une histoire qui tend de plus en plus à se faire à son insu. Fondées sur de solides connaissances théoriques qui ne doivent jamais se diluer dans une pédagogie atomisée pour des raisons de professionnalisation des enseignements, les valeurs auxquelles il aura été éduqué à l’École nouvelle assureront dans le temps et dans l’espace son élévation bien au-dessus des conditions instrumentale, botanique et zoologique.
La fin de l’École nouvelle est donc de garantir à l’apprenant les savoirs théoriques et pratiques pouvant lui assurer l’autonomie intellectuelle ou la capacité à penser par la nécessité de son propre pouvoir judicatif dans un monde de lisibilité difficile et désormais surpeuplé de followers qui s’abreuvent constamment à la doxa cultivée et entretenue par les agences de propagande idéologique locales et globales à travers notamment les réseaux sociaux.

Pour que l’École soit effectivement ce centre de production et de diffusion des savoirs et des valeurs susceptibles de contribuer au progrès de l’humanité, il importe qu’elle se démocratise dans une perspective élitaire, laquelle consiste à mettre les savoirs à la disposition de tous, afin de sortir l’homme de ce qu’Emmanuel Kant appelle sa Minorité. C’est pour donner à l’homme l’occasion de sortir de sa minorité que le SNAEF promeut l’École nouvelle dont il définit les fondements et la finalité à travers l’ouvrage qui vous est présenté ici et maintenant.

Pour le SNAEF, une autre école est possible, c’est-à-dire une école tout à fait différente de celle que nous avons héritée de la colonisation et dont l’esprit et la lettre ont été réactualisés par les pouvoirs néocoloniaux. C’est parce qu’il est possible de réaliser, pour le bien du Cameroun et de l’Afrique, une école tout à fait différente de celle dont le FMI et la Banque mondiale sont à la fois les architectes et les conseillers d’orientation, que le SNAEF promeut le paradigme pédagogique contenu dans cet ouvrage dont je vous recommande la lecture.

Partager cet article
Repost0

commentaires